lundi 7 avril 2008
Porto Rico Le gouverneur assigné à résidence
Les vieux quartiers de San Juan se laissent bercer par la mer des Antilles; le gouverneur de l’île, Anibal S. Acevedo Vila, lui, est secoué par une vague de fond : il est accusé d’avoir violé les règles de financement électoral et d’avoir recueilli illégalement quelque 500 000 $ afin de rembourser les dettes encourues à la suite de son élection à titre de représentant non votant au Congrès des États-Unis en 2000 et 2004.
À la veille des élections de novembre prochain, le gouverneur Acevedo, loin d’avouer quelque forfait que ce soit, interprète les accusations portées contre lui par le FBI comme une offensive politique ourdie par la Maison blanche et son occupant, George W. Bush. Acevedo est l’un des super délégués de Porto Rico qui participeront au congrès à l’investiture démocrate de Denver, Colorado, en août prochain et est toujours candidat à sa succession au poste de gouverneur.
De fait, le gouverneur confiné par la justice dans son palais de La Fortaleza, résidence des gouverneurs de l’île depuis le 17ème siècle, soutient que cette « manœuvre » républicaine trouve son origine dans les accusations qu’il a portées à l’encontre du FBI. Un militant indépendantiste portoricain en fuite est mort lors d’un raid de l’agence fédérale en 2005.
Le gouverneur Acevedo joue à fond la carte nationaliste portoricaine dans le but de discréditer l’enquête du FBI à son sujet en accusant le gouvernement américain de vouloir saigner économiquement son île. « They want blood, clame-t-il, not your well being ».
La procureure fédérale au dossier, Rosa Emilia Rodriguez, nie l’existence de tout motif politique derrière les accusations portées. Le doute peut cependant subsister au lendemain de la démission du procureur général des États-Unis, l’automne dernier. Alberto Gonzales avait congédié une douzaine de procureurs fédéraux en raison de leur réticence, sinon leur refus net, de soutenir des causes visant des personnes aux idées libérales. Le président Bush a soutenu Gonzales jusqu’au bout et a regretté son départ.
Militant démocrate, le gouverneur Acevedo est un tenant de l’autonomie de l’île de Porto Rico, un « état libre associé » aux États-Unis. Les États-Unis ont acquis l’île de l’Espagne à la fin du 19ème siècle. Il s’objecte donc aux visées des tenants d’un rattachement du pays à titre de 51ème état des États-Unis, de même qu’à l’indépendance totale. Les Portoricains disposent d’un représentant élu au congrès américain, sans droit de vote, possèdent un passeport américain, doivent servir dans les forces armées des États-Unis mais sont exonérés de tout impôt fédéral.
La mise en accusation d’un gouverneur démocrate (Acevedo a appuyé Barack Obama) s’inscrit dans la foulée de la démission du gouverneur de l’état de New York, Eliot Spitzer, accusé d’être impliqué dans un réseau de prostitution, et de celle, en 2006, du gouverneur de l’Alabama, Don Siegelman, accusé de corruption. Voilà autant de munitions dans l’arsenal républicain en vue des élections du 4 novembre qui permettront d’illustrer le peu de valeur morale qui a cours dans le camp démocrate.
Dès sa source, le fleuve anticipe la mer,
Et la fleur sait le fruit, savoureux ou amer,
Qui la prolongera dans le temps et l’espace.
Gilles Hénault (L’invention de la roue…)
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