vendredi 30 mai 2008

Mexique La guerre sévit


C’est une véritable guerre civile qui a cours présentement au Mexique. Plus de 4 000 personnes sont mortes depuis un an et demi dans des affrontements entre la police et l’armée face aux cartels de la drogue.

Dès son arrivée à la présidence du pays, en décembre 2006, Filipe Calderón a annoncé qu’il allait mettre fin au pouvoir des cartels de la drogue qui, au fil des années, ont infiltré tous les paliers du pouvoir, politique, financier, policier et militaire.

Début mai, par exemple, le commandant de la police fédérale, Édgar Millán Gómez a été tiré à bout portant en arrivant à son appartement. Pourtant, ses déplacements, tout comme son emploi du temps, étaient gardés secrets. Il dormait à différents endroits tous les soirs, ne se rendant dans sa résidence de fonction que sporadiquement. Il semble que le tueur ait été embauché par un officier de la police fédérale lié au cartel de Sinaloa. C’est lui qui lui aurait remis les clés de l’appartement en l’informant du moment où le commandant s’y rendrait.

L’état de Sinaloa est situé au nord-ouest du pays sur la frontière des états américains de l’Arizona, du Nouveau-Mexique et du Texas. Les cartels de la drogue y opèrent principalement dans les villes de Nuevo Laredo, de Juárez et, dans l’état voisin de Baja California, à Tijuana.

Pour soutenir les efforts du président Calderón à l’encontre des cartels, l’administration Bush soutient que le Congrès doit voter d’urgence une somme 1,4 milliard de dollars en équipement et centres d’entraînement à l’intention de la police mexicaine. Il va de soi que les États-Unis sont préoccupés par l’activité des cartels, la drogue traversant la frontière pour se retrouver dans les rues des grandes villes du pays.

Démission généralisée

Le président Calderón a mobilisé jusqu’ici pas moins de 20 000 policiers et soldats pour combattre les barons de la drogue qui ne reculent devant rien pour intimider l’ennemi. Ainsi, en début d’année, à Juárez, une liste de 22 officiers de police a été affichée sur un monument à la mémoire des policiers morts en service les prévenant qu’ils allaient être assassinés s’ils ne cessaient pas leur travail. De fait, sept d’entre eux ont été victimes d’attentats et en sont morts, trois ont été blessés. Les autres, sauf un, ont remis leur démission dont le chef de police de Juárez après l’exécution de son adjoint.

Comment se fait-il que malgré des effectifs aussi imposants et l’aide du voisin américain, il soit impossible de neutraliser les cartels? L’économie du Mexique bat de l’aile. Les délocalisations vers les pays émergents se succèdent, laissant dans leur sillage du chômage. La corruption a toujours eu cours au Mexique dans les milieux politiques, financiers et policiers. Les touristes qui louent une voiture en savent quelque chose lorsqu’ils se font intercepter par la police pour des broutilles et qu’ils s’en sortent en glissant quelques pesos dans la poche de l’agent zélé.

Les cartels de la drogue peuvent opérer parce qu’ils ont un marché gigantesque à portée de la main, des moyens d’approvisionnement (culture et transformation) et une main d’œuvre d’autant plus disponible que le chômage augmente. La répression, dont les moyens croissent sans cesse, ne semble guère efficace. Quelle est donc la recette qui permettra de mettre fin au trafic des drogues? D’abord un assainissement des mœurs, de part et d’autre des deux mille milles de frontière entre le Mexique et les États-Unis? Et de l’emploi?

Verser quelques gouttes de miel,
Comme une divine ambroisie,
Dans la coupe pleine de fiel
Qu’à nos lèvres offre la vie!


Moïse-Joseph Marsile (Les abeilles)

vendredi 23 mai 2008

Le NPD À l'assaut du Québec


Capitaine Jack et son lieutenant québécois Thomas lanceraient le NPD à l’assaut du Québec dans le but de gruger dans l’électorat du Bloc québécois.

C’est la conclusion à laquelle en arrive le journaliste de La Presse en constatant que le duo avait assisté à une soirée pour souligner le 25ème anniversaire du Fonds de solidarité de la FTQ. Selon le reporter, « l’objectif de cette visite des deux ténors du NPD visait à souligner l’anniversaire, mais aussi à rappeler aux dirigeants de ce syndicat que le NPD est un parti qui défend les intérêts des travailleurs syndiqués à Ottawa ».

Le lieutenant Mulcair a affirmé avoir reçu un accueil d’autant plus chaleureux que Michel Arsenault, le nouveau président de la FTQ, souhaitait se faire photographier avec le capitaine Layton.

Cependant, selon la porte-parole du Bloc québécois, les deux mousquetaires seraient arrivés sur place en retard pour quitter trois quarts d’heure après, puisqu’ils n’étaient pas invités au cocktail des invités d’honneur.

Pour étayer son assurance de percer au Québec, Thomas Mulcair soutient être allé chercher 70 pour cent du vote du Bloc à l’élection partielle qui l’a conduit aux Communes.

Optimisme candide ou constat réaliste?



Les dirigeants du Fonds de solidarité de la FTQ sont des gens polis. Ils n’allaient sûrement pas ignorer la présence d’un chef de parti politique et de son unique député québécois. D’autant que la FTQ est une fédération du Congrès du travail du Canada (CTC) qui appuie, élection après élection, en ressources humaines et financières, le NPD. Que le NPD épouse les positions syndicales face à la caisse de l’assurance emploi ou à un projet de loi anti briseurs de grève, par exemple, n’a rien d’exceptionnel.

Par ailleurs, le nouveau président de la FTQ, Michel Arsenault, a travaillé pendant cinq ans au siège canadien des Métallurgistes unis d’Amérique (les Métallos) à Toronto, à l’époque où, notamment, Jack Layton était maire de la ville. Il n’est pas étonnant que tous deux posent pour la postérité.

La FTQ, toutefois, a toujours eu les coudées franches, en matière électorale, par rapport au CTC. Pas question d’accrocher son wagon partisan à celui de la locomotive de l’organisation pan canadienne. Polie oui, mais c’est tout.

Pour se faire élire, Thomas Mulcair a choisi Outremont, un château fort… libéral. Dans l’état où étaient les troupes libérales au Québec au moment de cette élection partielle, il y a fort à parier que même Léo-Paul Lauzon y aurait été élu si sa santé le lui avait alors permis.

Le premier député québécois du NPD de l’ère moderne s’était aussi fait élire dans une élection partielle dans Chambly en 1990. Philip Edmonston a vite fait de tirer sa révérence dépité des positions de son parti face au Québec et à ses revendications.

Car, il faut bien le rappeler, le NPD est un parti fédéraliste centralisateur. Très centralisateur. Autant sinon plus que le Parti libéral du Canada. Rappelons également que l’accord du lac Meech a coulé à la Chambre des communes grâce au vote d’un néo-démocrate de l’ouest.

En absence du Bloc québécois à Ottawa, où iraient les revendications du Québec? Une chose est sûre, il ne faudrait pas compter sur le NPD pour les défendre. Les députés québécois du parti seraient vite rabroués par leurs collègues des autres provinces.

Une percée néo-démocrate au Québec n’aura de chance de se produire que le jour où l’aile québécoise aura fait adopter en congrès national une autonomie suffisante qui lui permette de se démarquer de la politique centralisatrice du parti. Cela signifie que l’aile québécoise pourrait porter des revendications non partagées par les députés des autres provinces et que ceux-ci pourraient voter contre. Autrement dit, le Québec n’aurait guère progressé.

Que le NPD continue de défendre l’indépendance canadienne; ce qu’il sait bien faire! Qu’il continue de porter les causes du milieu du travail canadien; ce qu’il réussit! Pour ce qui est du Québec, l’électorat québécois sait qui et quoi il veut à Ottawa.

Grisés par les parfums qui montaient du gramen,
Nous avions modulé, d’une voix un peu haute,
L’hymne dont un baiser est quelquefois l’Amen.


Pamphile Lemay (Candeur)

vendredi 16 mai 2008

Floride Allstate perd de l’assurance


Les législateurs floridiens ont eu raison d’interdire à Allstate de vendre toute nouvelle police d’assurance jusqu’à ce que la compagnie soumette aux parlementaires tous les documents requis par le comité spécial mis sur pied pour analyser le marché des assurances. Ainsi en a décidé la cour d’appel de la Floride.

Si, comme le veut le slogan publicitaire d’Allstate « vous êtes entre bonnes mains » quand vous achetez une police d’assurance de cette entreprise, l’état de la Floride croit plutôt qu’elle les a trop longues et qu’elles nourrissent un appétit financier trop grand. Résultat : en janvier dernier, l’état ordonnait à la compagnie d’assurance et à ses filiales de cesser de vendre ses polices. Tout de même étonnant au pays par excellence du libre marché.

Les démêlés d’Allstate avec la législature de Thallahassee, capitale de la Floride, remonte au mois de janvier 2007, alors que le parlement adoptait une loi qui permettait à l’état d’avancer des fonds afin d’amortir les coûts de réassurance que devaient supporter les compagnies d’assurance en sol floridien à la suite des huit ouragans survenus en 2004 et 2005. Ce faisant, les législateurs réclamaient des assureurs qu’ils diminuent leurs primes de 25 pour cent.

Non seulement Allstate n’a pas réduit le coût de ses assurances, elle les a même augmenté de 10 à 50 pour cent dans certains cas. Devant ce constat, les élus de la Floride ont formé un comité spécial du sénat pour étudier la question. Celui-ci a fait comparaître toutes les compagnies d’assurance opérant dans l’état en visant tout particulièrement Allstate. Le comité a réclamé, entre autre chose, la production de toutes les pièces pouvant expliquer la réduction ou l’augmentation du prix des polices d’assurance, que ce soit en automobile ou en résidentiel.

Allstate a expédié au comité 150 000 pages de documents, espérant de la sorte submerger les parlementaires et paralyser leurs travaux. C’était sans compter sur la pugnacité des sénateurs. Ceux-ci ont dépouillé cette volumineuse documentation pour constater qu’essentiellement il s’agissait d’information déjà publique, une bonne partie apparaissant même sur le site Internet de l’entreprise. Les représentants d’Allstate, pointés du doigt, ont expliqué que l’information qui n’apparaît pas au dossier est confidentielle et ne peut être rendue publique car elle comporte des secrets commerciaux.

Des sénateurs têtus

Les sénateurs ne l’ont pas entendu de cette oreille et ont exigé du Bureau de réglementation de l’assurance qu’il retire à Allstate ses permis d’opération en Floride. Il va de soi qu’Allstate a répliqué en s’adressant au tribunal pour faire casser l’ordonnance. La Cour d’appel de la Floride vient de rendre sa décision en reconnaissant que les sénateurs ont raison et qu’ils peuvent prononcer l’interdit à l’endroit d’Allstate.

Non satisfaite de narguer les élus de la Floride, Allstate a affiché, pour l’année 2007, des bénéfices record de l’ordre de quelque cinq milliards de dollars qu’elle a versés sous forme de dividende à ses actionnaires plutôt que d’en faire profiter ses assurés.

L’attitude des sénateurs de la Floride constitue sans doute une première dans le monde de l’assurance, et ce, d’autant plus que ce sont les Républicains qui sont au pouvoir sous la houlette de Charlie Crist, gouverneur de l’état. L’intervention de l’état dans les affaires commerciales est loin d’être monnaie courante aux États-Unis. Il fallait que la coupe soit pleine pour qu’une intervention de la sorte survienne.

Allstate, par son comportement, illustre bien l’attitude courante des compagnies d’assurance : collecter les primes, ça va; verser des indemnités, le moins possible.

D’autre part, le courage politique démontré par les élus de la Floride devrait inspirer leurs homologues de Washington face aux pétrolières qui forent, extraient l’or noir, le raffinent puis se le vendent sous forme d’essence avec des profits faramineux.

Du plus haut des nuées, du pôle des espaces,
Ils descendront d’un vol éclair les grands rapaces,
Ils fondront sur le Corps au signal de leur faim
Mieux qu’un homme excité par le tourment du vin.


Gustave Lamarche (L’assemblée des aigles)

vendredi 9 mai 2008

Paraguay Rupture avec 61 ans d’un régime corrompu



Le pape Benoit XVI a quitté l’Amérique en avril sans même jeter un coup d’œil du côté du nouveau président élu du Paraguay, Fernando Lugo. L’église catholique romaine, n’a jamais apprécié l’émergence de la théologie de la libération dans les années 1970 en Amérique latine. Le pape a donc choisi d’ignorer l’élection d’un ancien évêque qui a démissionné de ses fonctions pour briguer les suffrages lors de la présidentielle du 20 avril.

Ce pays vit un épisode sans précédent. C’est la première fois, depuis son accession à l’indépendance, en 1811, que le Paraguay connaîtra un régime politique librement élu à la suite d’une campagne électorale menée par un parti d’opposition contre le régime en place.

Depuis 1957, le Parti Colorado a dominé le paysage politique paraguayen, dont 35 ans sous la férule du général dictateur Alfredo Stroessner au pouvoir de 1954 à 1989. La recette imaginée par le Parti Colorado pour accaparer le pouvoir pendant tout ce temps : se constituer un noyau de loyaux supporteurs rouages d’un système de patronage qui ne faisait aucune distinction entre le gouvernement et le parti, le tout soutenu par une armée à la solde de ce même parti.

Fernando Lugo, qui entrera en fonction le 15 août prochain, a fait campagne en prônant la renégociation avec le Brésil et l’Argentine de contrats de fourniture d’énergie et une équitable distribution des terres entre les paysans. Le Brésil a déjà signifié une fin de non-recevoir quant à la révision des contrats en hydro-électricité et les 500 000 Brésiliens d’origine qui exploitent la culture du soya au Paraguay n’entendent pas se laisser déposséder. La tâche qui attend Fernando Lugo ne sera donc pas de tout repos.

Autre rupture

L’élection de Fernando Lugo s’inscrit dans la foulée d’une suite de ruptures des pays d’Amérique latine avec des pouvoirs autoritaires : Chavez au Venezuela, Bachelet au Chili, Correa en Équateur, Garcia au Pérou; et les voisins immédiats : Morales en Bolivie, Lula au Brésil et Kirchner en Argentine. Ce remue-ménage politique n’est pas sans inquiéter les grandes entreprises installées dans ces pays, surtout quand ces nouveaux dirigeants fréquentent le gouvernement cubain.

Il va sans dire que Fernando Lugo a du pain sur la planche. Le revenu annuel moyen par habitant est de 4 000 $ au Paraguay, la pauvreté touche 43 pour cent de sa population de 6,8 millions de personnes et 13 pour cent de la main d’oeuvre est au chômage. Il devient évident, dans un tel contexte, qu’un coup de barre radical s’impose avec toutes les embûches qui ne manqueront pas de se manifester au sein de la classe possédante. Par ailleurs, le Paraguay étant, avec la Bolivie, l’un des deux pays enclavés d’Amérique du Sud, il a besoin de ses voisins qui ont accès au transport maritime afin d’exporter ses produits agricoles, miniers et forestiers, ses principales ressources avec l’hydro-électricité.

Au sein même de la coalition qui l’a porté au pouvoir, Fernando Lugo devra composer avec des éléments radicaux impatients de voir s’implanter des réformes fondamentales et d’autres qui l’inciteront à mettre la pédale douce. De fait, Lugo est à la tête de l’Alliance patriotique pour le changement, rassemblement de huit petits partis, dont le Parti démocrate chrétien, dont il est issu. Ce regroupement arc-en-ciel compte également le Parti libéral radical authentique de centre-droit qui, jusqu’à l’élection d’avril, était le principal parti d’opposition. Frederico Franco, co-listier de Lugo, dirigeait ce parti et il deviendra vice-président du pays en août.

Franco a d’ailleurs obtenu l’adhésion au nouveau gouvernement d’un ancien ministre de l’Économie qui avait été évincé par le régime précédent en raison des mesures d’austérité qu’il prônait, tout en plaidant pour un assainissement des mœurs politiques. Ce sont ses budgets appliqués de 2003 à 2006 qui auraient conduit à une croissance de l’économie paraguayenne de l’ordre de six pour cent l’an dernier.

Fernando Lugo n’a qu’à regarder par-dessus son épaule pour constater que les réformes se butent à forte résistance quand elles veulent se concrétiser. Evo Morales, en Bolivie, fait face à une fronde bien organisée depuis qu’il a parlé de nationaliser l’industrie pétrolière dans son pays. L’opposition à ses politiques s’est traduite par la tenue d’un référendum réclamant l’indépendance du riche état de Santa Cruz. Cette aspiration à l’indépendance n’a rien à voir avec le nationalisme; il s’agit d’une opération strictement économique, cet état souhaitant profiter en exclusivité de la richesse produite par l’exploitation des puits de pétrole et en éviter l’étatisation.

Les cinq années que vivra Fernando Lugo à la présidence de son pays (le mandat présidentiel n’est pas renouvelable) seront ardues. Comment en cinq ans rompre avec plus de 60 ans de corruption, de népotisme et d’autoritarisme?

L’infidèle



Ses sorties publiques, que ce soit à Miami ou ailleurs en Amérique du Nord, ne passent jamais inaperçues. Alina Fernandez, la fille de Fidel Castro, étale sa déception devant les réformes en cours dans son pays d’origine maintenant sous la direction de son oncle Raúl.

Mme Fernandez estime qu’à Cuba tout est à faire. « En commençant par ouvrir le pays à tous les marchés. » Il demeure étrange qu’elle ne réclame pas du même souffle que les États-Unis lèvent l’embargo qui frappe Cuba depuis le début des années 1960. Craint-elle de contrarier la diaspora anti castriste qui s’active bruyamment à partir de Miami? Si les millions de dollars versés par le gouvernement des États-Unis à l’opposition cubaine en Floride pour déstabiliser l’île des Antilles étaient canalisées vers des échanges commerciaux, est-ce que cela faciliterait la libéralisation du régime réclamée par le peuple cubain et leurs compatriotes exilés?

Les astres qui brillaient pour d’autres, je les porte,
Et je vais attentive, à travers les humains,
Songeant que mon étoile, un autre me l’apporte,
Et nous échangerons nos astres en chemin.


Jovette Bernier (Au chemin des étoiles)

vendredi 2 mai 2008

Aux USA comme au Canada Les services secrets torpillent leur crédibilité


Ironique coïncidence. Les substituts du procureur général de l’Ontario abandonnent les accusations de terrorisme portées contre quatre résidants de Brampton; moins de 48 heures plus tard, un jury, pour la deuxième fois, est incapable de rendre un verdict dans le cas des « sept de Liberty City » à Miami.

Les deux cas se ressemblent tellement que s’il s’agissait d’une production cinématographique, il y aurait certainement des poursuites pour violation de droits d’auteurs et plagiat : des suspects reliés à Al-Qaeda, des projets terroristes tellement ambitieux qu’on peut mettre en doute l’équilibre mental de leurs auteurs, des agents provocateurs très zélés, des agences de renseignements gourmandes de fonds d’opération et des substituts de procureur général et District Attorneys dépourvus de tout esprit d’objectivité dans l’analyse de leurs dossiers.

Sauf que les scénaristes, ici, sont des agents très spéciaux et secrets : le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) et le Federal Bureau of Investigation (FBI). Il apparaît que leurs méthodes de travail se ressemblent tellement qu’elles débouchent sur le même résultat : néant.

Au Canada

Le hasard faisant bien les choses, les fins limiers du SCRS tombaient, en juin 2007, sur un groupe menaçant de 17 personnes (18 quelques mois plus tard) d’origine arabe, et donc facile à relier à Al-Qaeda, qui projetait, notamment, d’investir le Parlement d’Ottawa, de prendre en otage des politiciens, de décapiter le premier ministre; rien que ça. Lors de l’arrestation du groupe, la police avait mentionné que les présumés terroristes étaient inspirés par l’idéologie de l’organisation terroriste Al-Qaeda. « Inspirés », juste le recours à cette terminologie n’aurait pu sonner une cloche à l’oreille du substitut du procureur général affecté au dossier?

Et comment ont-il été arrêtés ces présumés terroristes? En prenant livraison de trois tonnes de nitrate d’ammonium, fertilisant qui devient explosif une fois mélangé à l’acide nitrique. Avez-vous déjà déplacé trois tonnes de n’importe quoi? Ça prend de l’espace et ça se voit. Le fertilisant est le même qui avait servi à l’attentat d’Oklahoma City. Il faut croire que n’importe qui peut encore en acheter. Et l’acide nitrique, comment on se la procure? Les suspects en avaient-ils en leur possession?

Enfin, qui livrait la commande? Un agent du SCRS.

Aux États-Unis

Dans le cas de Miami, les suspects sont des Haïtiens. Dans ce cas, il devenait plus difficile de lier le groupe à Al-Qaeda. Mais avec un peu d’imagination, tout est possible. Ainsi, les Haïtiens, dont la nature religieuse est fondamentalement catholique et teinté de vaudou, donc loin de l’Islam, ont tout bonnement prêté serment d’allégeance à Al-Qaeda. Qui leur a demandé de procéder ainsi? Mohamed (cela va de soi), un agent du FBI qui se disait commanditaire et financier du groupe terroriste international.

Quelles étaient les cibles terroristes du groupe? La destruction de la tour Sears de Chicago, rien de moins, et le quartier général du FBI à … Miami. Dans ce dernier cas, les renseignements étaient aisés à fournir au groupe puisque l’informateur était de la maison. L’agent du FBI au dossier se faisant passer pour quelqu’un qui avait l’argent nécessaire pour financer les opérations et les supposés suspects étant des manœuvres du secteur de la construction où les salaires sont pitoyables, il devenait facile de persuader les membres de ce groupe de signer n’importe quoi en retour du moindre pécule. Le quartier de Liberty City de Miami (où s’entassent entre autres les immigrants fraîchement débarqués d’Haïti) n’est pas exactement comparable à ceux de Coral Gables ou de Key Biscayne.

Après deux rebuffades par deux jurys, le procureur au dossier n’en démord pas. Il veut tenter sa chance une troisième fois. Et la juge laisse passer.

La cause a déjà coûté des millions de dollars aux contribuables américains. Qu’à cela ne tienne. Un ex-procureur, Guy Lewis, affirme : « Si la tolérance zéro fait partie de votre mandat, je ne m’assoirais pas là à griffonner des X et des O. La réponse, c’est oui on y va, on doit procéder. »

Croupir en prison

Que deviennent ces « suspects » engagés dans un engrenage dont ils ne comprendront jamais les rouages? Ils croupissent en prison sans liberté sous caution. Et les agences de contre-espionnage passent à la caisse en faisant miroiter des menaces terroristes qui n’existent que dans leurs plans machiavéliques. Contribuent-elles de la sorte à la sécurité de leur pays? À trop crier au loup…

Dans l’ombre des bouffons composaient des grimaces
Et les empaquetaient dans des caisses de bois
Ou de carton gaufré de peur qu’on ne les casse
Ils y mettaient aussi des brins de mimosas


Claude Mathieu (Voyage en chimérie)