vendredi 16 mai 2008

Floride Allstate perd de l’assurance


Les législateurs floridiens ont eu raison d’interdire à Allstate de vendre toute nouvelle police d’assurance jusqu’à ce que la compagnie soumette aux parlementaires tous les documents requis par le comité spécial mis sur pied pour analyser le marché des assurances. Ainsi en a décidé la cour d’appel de la Floride.

Si, comme le veut le slogan publicitaire d’Allstate « vous êtes entre bonnes mains » quand vous achetez une police d’assurance de cette entreprise, l’état de la Floride croit plutôt qu’elle les a trop longues et qu’elles nourrissent un appétit financier trop grand. Résultat : en janvier dernier, l’état ordonnait à la compagnie d’assurance et à ses filiales de cesser de vendre ses polices. Tout de même étonnant au pays par excellence du libre marché.

Les démêlés d’Allstate avec la législature de Thallahassee, capitale de la Floride, remonte au mois de janvier 2007, alors que le parlement adoptait une loi qui permettait à l’état d’avancer des fonds afin d’amortir les coûts de réassurance que devaient supporter les compagnies d’assurance en sol floridien à la suite des huit ouragans survenus en 2004 et 2005. Ce faisant, les législateurs réclamaient des assureurs qu’ils diminuent leurs primes de 25 pour cent.

Non seulement Allstate n’a pas réduit le coût de ses assurances, elle les a même augmenté de 10 à 50 pour cent dans certains cas. Devant ce constat, les élus de la Floride ont formé un comité spécial du sénat pour étudier la question. Celui-ci a fait comparaître toutes les compagnies d’assurance opérant dans l’état en visant tout particulièrement Allstate. Le comité a réclamé, entre autre chose, la production de toutes les pièces pouvant expliquer la réduction ou l’augmentation du prix des polices d’assurance, que ce soit en automobile ou en résidentiel.

Allstate a expédié au comité 150 000 pages de documents, espérant de la sorte submerger les parlementaires et paralyser leurs travaux. C’était sans compter sur la pugnacité des sénateurs. Ceux-ci ont dépouillé cette volumineuse documentation pour constater qu’essentiellement il s’agissait d’information déjà publique, une bonne partie apparaissant même sur le site Internet de l’entreprise. Les représentants d’Allstate, pointés du doigt, ont expliqué que l’information qui n’apparaît pas au dossier est confidentielle et ne peut être rendue publique car elle comporte des secrets commerciaux.

Des sénateurs têtus

Les sénateurs ne l’ont pas entendu de cette oreille et ont exigé du Bureau de réglementation de l’assurance qu’il retire à Allstate ses permis d’opération en Floride. Il va de soi qu’Allstate a répliqué en s’adressant au tribunal pour faire casser l’ordonnance. La Cour d’appel de la Floride vient de rendre sa décision en reconnaissant que les sénateurs ont raison et qu’ils peuvent prononcer l’interdit à l’endroit d’Allstate.

Non satisfaite de narguer les élus de la Floride, Allstate a affiché, pour l’année 2007, des bénéfices record de l’ordre de quelque cinq milliards de dollars qu’elle a versés sous forme de dividende à ses actionnaires plutôt que d’en faire profiter ses assurés.

L’attitude des sénateurs de la Floride constitue sans doute une première dans le monde de l’assurance, et ce, d’autant plus que ce sont les Républicains qui sont au pouvoir sous la houlette de Charlie Crist, gouverneur de l’état. L’intervention de l’état dans les affaires commerciales est loin d’être monnaie courante aux États-Unis. Il fallait que la coupe soit pleine pour qu’une intervention de la sorte survienne.

Allstate, par son comportement, illustre bien l’attitude courante des compagnies d’assurance : collecter les primes, ça va; verser des indemnités, le moins possible.

D’autre part, le courage politique démontré par les élus de la Floride devrait inspirer leurs homologues de Washington face aux pétrolières qui forent, extraient l’or noir, le raffinent puis se le vendent sous forme d’essence avec des profits faramineux.

Du plus haut des nuées, du pôle des espaces,
Ils descendront d’un vol éclair les grands rapaces,
Ils fondront sur le Corps au signal de leur faim
Mieux qu’un homme excité par le tourment du vin.


Gustave Lamarche (L’assemblée des aigles)

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