lundi 9 mars 2009
USA Le père de la radio-poubelle leader des Républicains?
Il travaille d’arrache-pied à la faillite du plan de relance du président Obama qu’il traite de socialiste, est contre le recours aux cellules souches, nie le réchauffement climatique, tient des propos racistes, qualifie les soldats s’opposant à la guerre d’Irak de peureux. Rush Limbaugh, à partir de ses studios de Palm Beach, en Floride, compte sur un auditoire de 13,5 millions de personnes qui l’écoutent religieusement débiter ses inepties semaine après semaine. Limbaugh est sans contredit, depuis la fin des années 70, le père universel de la radio-poubelle.
Si sa cible favorite, par les temps qui courent, est le Parti démocrate, il ne ménage guère non plus les « Républicains-démocrates », comme il les appelle. Le combat de Limbaugh quant à la nécessité de maintenir la ligne dure à l’encontre des « socialistes » de la Maison blanche fait dire à Rahm Emanuel, directeur du personnel de la présidence, que le véritable meneur du Parti républicain n’est nul autre que Rush Limbaugh. Cette déclaration est intervenue à l’occasion d’une entrevue accordée à l’émission Face the Nation diffusée le dimanche 1er mars sur CBS.
Prenant le relais de cette déclaration, le président du Parti républicain, Michael Steel, a qualifié Limbaugh d’amuseur public sur CNN à quoi, l’animateur radio a rétorqué le lendemain que Steel n’était pas fait pour diriger son parti. Steel, constatant qu’il ne pouvait avoir le dernier mot avec Limbaugh, lui a finalement présenté ses excuses. Et Limbaugh d’en remettre en invitant, le mercredi 4 mars, le président Obama à débattre avec lui pendant son émission tout en offrant d’assumer ses frais de transport et de sécurité.
Si les adjoints du président Obama et les membres influents du Parti démocrate pointe de la sorte Limbaugh, c’est que celui-ci multiplie les attaques contre le plan de relance et les politiques du président. « Qu’y a-t-il d’étrange, explique Limbaugh, au fait d’être franc quand je dis que je souhaite que Barack Obama échoue dans sa mission de rebâtir et réformer ce pays comme si le capitalisme et les libertés individuelles n’étaient pas son fondement. »
La base du Parti démocrate se mobilise également et a mis sur pied un concours intitulé « Send Rush a message » jeu de mots avec le prénom de l’animateur et l’urgence d’agir pour le contrer. Le parti désire recevoir des suggestions de messages afin de répliquer à Limbaugh et le slogan qui l’emportera sera affiché à proximité de sa résidence de Palm Beach. Le porte-parole du Parti démocrate insiste : « Nous souhaitons que Limbaugh voit notre message et sache ceci : les Américains veulent que le président Obama réussisse parce que s’il réussit, c’est notre pays qui réussira. »
Le président du Parti républicain du comté de Palm Beach rétorque que Limbaugh ne désire pas l’échec du pays mais s’objecte, comme beaucoup d’autres Républicains, au coût des solutions soumises par le président, oubliant de mentionner que l’administration Bush a laissé en héritage à celle d’Obama le déficit le plus lourd jamais enregistré depuis l’indépendance des États-Unis.
Dans sa croisade anti-Obama, Limbaugh tire à boulets rouges sur toutes les décisions prises et les nominations annoncées. Ainsi, Julius Genachowski a récemment été nommé commissaire à la Commission fédérale des communications (FCC). Qu’a-t-il à reprocher au nouveau commissaire? Il serait favorable à l’information régionale, contre la concentration des entreprises de radiodiffusion et l’accès des minorités ethniques à la propriété de stations de radio ou télé. Pour Limbaugh, c’est clair et net : cette nomination est un pas supplémentaire d’Obama dans sa guerre contre le capitalisme.
Feuille de route
Rush Limbaugh a un curriculum vitae farci de controverses qui font ressortir la courtoisie des propos d’un Louis Champagne, d’un Jeff Filion ou d’un Gilles Proulx. Quelques exemples.
Michael J. Fox, atteint de la maladie de Parkinson, milite en faveur des recherches sur les cellules souches. Limbaugh soutient que Fox recourt à ses dons d’acteur pour exagérer les symptômes de sa maladie afin de défendre sa cause.
Des vétérans de l’armée américaine s’étant joints à une manifestation pour protester contre la guerre en Irak se sont fait traiter de peureux et de soldats-bidons par Limbaugh.
Le réchauffement climatique n’existe tout simplement pas, selon Limbaugh, qui en donne la preuve en affirmant que les hivers sont plus froids que jamais aux États-Unis et que la neige s’y fait toujours abondante d’une année à l’autre. De la simplicité ou du simplisme?
Pendant la campagne des primaires présidentielles, Limbaugh a lancé son opération « chaos ». Il incitait les militants républicains à s’inscrire sur les listes de votes des démocrates et de voter en faveur d’Hilary Clinton pour empêcher l’élection d’Obama.
En 2003, ESPN a embauché Limbaugh à titre de commentateur pour les matchs de football de la NFL. Livrant ses impressions sur la performance de Donovan McNab, quart-arrière de couleur des Eagles de Philadelphie, Limbaugh a estimé que celui-ci ne méritait pas les éloges qui lui étaient prodigués parce que c’est la défensive qui a fait tout le travail en faveur de l’équipe. « Bien entendu, ajoutait-il, les médias voudraient bien qu’un noir fasse du bon travail comme quart-arrière. » Face aux tollés qui ont suivi, Limbaugh a remis sa démission à ESPN.
Un épisode de sa vie à occuper les manchettes pendant de longues semaines, il a y cinq ans, à partir de révélations du National Enquirer, un vif concurrent de Limbaugh pour le titre lanceur de boue dans l’opinion publique. Limbaugh, selon l’hebdo, serait accroc aux médicaments, ce qu’il avoue à ses auditeurs. Mais loin de s’arrêter là, l’histoire déclenche une enquête policière et Limbaugh est accusé, en 2006, de « doctor shopping ». Il collectionnait les ordonnances par dizaine pour se procurer des médicaments. La poursuite en est venu à une entente à l’amiable. Limbaugh ne fera pas de prison mais en retour versera 30 000 $ pour défrayer les coûts de l’enquête et s’engagera dans un programme de désintoxication d’une durée de 18 mois. Fréquemment sur ses ondes, Limbaugh s’attaquait aux juges qu’il qualifiait de trop cléments envers les consommateurs de drogue qui, selon lui, méritaient tous d’être emprisonnés.
L’idole de Limbaugh demeure Ronald Reagan pour qui moins d’état était le meilleur état qui soit. George W. Bush a poursuivi avec zèle cette philosophie, sous les applaudissements de Limbaugh, et a placé son pays en crise après avoir déréglementé tout ce qu’il pouvait, à commencer par le secteur financier.
Fidèle à lui-même, Limbaugh traite couramment Obama de « magicien nègre », en souhaitant voir se briser sa baguette magique qui opère avec magnétisme sur l’opinion publique, ce qui enrage le commentateur de 58 ans.
Le venin du bout de la langue
Se crache à pleines ondes
Aucun couvercle sur l’amas de vidange
Ne retient ces propos immondes
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