lundi 26 novembre 2007

Venezuela vs Colombie Un duel présidentiel

Hugo Chávez du Venezuela traite son homologue colombien, Alvaro Uribe, de menteur; ce dernier accuse son vis-à-vis d’impérialisme. Autrement dit, le torchon brûle entre les gouvernements du Venezuela et de la Colombie.

Au cœur de la prise de bec : les 45 otages détenus par les Forces armées révolutionnaires de la Colombie (FARC) et les 500 guérilleros des FARC qui demeurent emprisonnés dans les prisons colombiennes.

Le président Vénézuélien, l’été dernier, s’est volontairement proposé à titre de médiateur entre le gouvernement colombien et le groupe d’opposition armée. Chávez s’était alors donné jusqu’au 31 décembre pour en arriver à la libération des otages ou reconnaître l’échec de sa démarche.

Au nombre des otages aux mains des FARC depuis 2002 : Ingrid Bétancourt, ex-candidate à la présidence de la Colombie, et toujours détentrice de la nationalité française où résident présentement ses enfants et son ex, ce qui retient l’attention du gouvernement de Nicolas Sarkosy.

Leur flamboyant comportement respectif aidant, la rencontre Chávez-Sarkosy, survenue la semaine dernière aux portes de l’Élysée, n’allait sûrement pas passer inaperçue. De son côté, le président Alvaro Uribe de Colombie, a décidé de gâcher la fête en annonçant, le mercredi 21 novembre, qu’il mettait fin à la médiation de son homologue sud-américain. « Déceptionne! » chantonnerait Charlebois.

La guerre?

À l’origine de la décision Uribe : Chávez, malgré ses engagements, a contacté directement le commandant de l’armée colombienne. Chávez rétorque, cinglant, qu’il n’a posé qu’une innocente question sur le nombre de soldats colombiens détenus par les FARC, avant d’enclencher l’offensive verbale : « Il y a des gens très proches d’Uribe, des gens avec beaucoup de pouvoirs qui ne souhaitent pas qu’il y ait un accord… Je ne m’aventurerais pas à dire qu’il (Uribe) ne le souhaite pas non plus, mais je suis certain qu’il y a des gens très proches de lui qui veulent simplement la guerre. » (Agence France Presse)


La Colombie réplique dans un communiqué: « Il est dans le plus grand intérêt du groupe terroriste des FARC de créer des fissures et l’antagonisme entre la Colombie et le Venezuela. Nous ne devons pas tomber dans le piège du terrorisme. »

Le président français a demandé à M. Uribe de maintenir le dialogue avec Chávez et le porte-parole colombien réagit en affirmant qu’il n’y aura pas de marche arrière. Au sein des familles des otages, en France comme en Colombie, c’est la consternation. « C’est quelque chose de dramatique », selon l’ex-époux de Mme Bétancourt. « On joue avec la douleur des familles victimes », insiste Marleny Orjuela, porte-parole des familles de militaires et policiers gardés en otage. Un diplomate européen estime que depuis la rencontre de Paris, M. Uribe ne cesse de dresser de nouveaux obstacles sur la voie d’un échange. Pour le chef de la majorité au parlement du Venezuela, chaque fois que Chávez prend une initiative pour tenter d’assouplir les positions, il y a une réplique très dure du gouvernement colombien.

Hugo Chávez ne lâche pas le morceau aussi aisément. Il demande ainsi au chef des FARC, Manuel Marulanda, de lui adresser des preuves de vie des otages. D’après Chávez, ces preuves obligeraient son homologue colombien à lui restituer son statut de médiateur.

Et l’orage persiste entre les présidents et il a des allures électriques. À une semaine de la tenue d’un référendum constitutionnel qui se tiendra au Venezuela, le président de la Colombie accuse son homologue de recourir à un vieux stratagème pour alimenter l’hostilité de longue date des Vénézuéliens à l’endroit des Colombiens pour se gagner leurs faveurs et de se servir de ses pétro-dollars pour rallier les autres pays du continent. Pour sa part, le président vénézuélien est d’avis que la Colombie mérite un autre président et, surtout, un meilleur président.

Derrière cette guerre de mots, se profile-t-il un autre acteur qui, tout en demeurant discret, ne manifeste pas moins une efficacité certaine? Les États-Unis, qui financent à coup de milliards de dollars le « Plan Colombie » d’éradication de la drogue, détestent la présence de Chávez à la tête de son pays et, surtout, la mauvaise influence socialisante qu’il exerce sur les autres pays d’Amérique centrale et du Sud.

Comme diraient Chávez et son ami et allié Fidel Castro : quand le démon yanki est dans les parages, le diable est aux vaches.

Sa bêche sur l’épaule entre les arbres noirs,
Le fossoyeur repasse, il voit la croix qui veille.


Alfred Garneau (Devant la grille du cimetière)

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