mercredi 26 septembre 2007

Québec : la santé dans une embardée


Le système de santé du Québec va à vau-l’eau. Semaine après semaine, quelque histoire d’horreur vient hanter le réseau : diagnostics faussés, prélèvements mal recueillis ou mal analysés, patients laissés sans surveillance. Tout ça, sans compter les délais d’attente, en urgence ou sur les listes d’interventions chirurgicales pour des cataractes, une hanche ou un genou artificiel.

Dernier épisode en date, enfin jusqu’à aujourd’hui : les 16 décès survenus à l’hôpital Honoré-Mercier de Saint-Hyacinthe, parce que des mesures élémentaires de propreté ont été déficientes. Quand les établissements de soins de courte, moyenne ou longue durée doivent, sur l’ordre du ministère de la Santé et des Services sociaux, réduire leurs dépenses ou respecter scrupuleusement les balises budgétaires imposées, le premier poste à écoper : l’entretien. Ce qui signifie notamment des coupures de postes dans l’entretien ménager.

Et que dire du personnel affecté par un désintéressement d’une profession dans le domaine de la santé par les jeunes en âge d’orienter leur carrière. La réalité de la vie quotidienne du personnel de soins infirmiers comme des préposés aux usagers ou des professionnels est tellement démobilisatrice que le recrutement est devenu une tâche plus qu’ardue à accomplir. Parmi les raisons : précarité d’emploi, horaires de travail en montagnes russes, temps supplémentaire obligatoire, rémunération inférieure à la moyenne nord-américaine et ainsi de suite.

Les gouvernements québécois successifs ne cessent de répéter que l’argent n’est pas le cœur du problème rejetant le blâme sur la gestion et l’organisation du travail. L’un des arguments majeurs : le pourcentage élevé du budget de la santé par rapport au budget du Québec : 31,7 p. cent en 2005-2006.

Or, le Québec enregistre le pourcentage le plus bas de toutes les provinces canadiennes. En effet, le spectre des dépenses de santé en pourcentage du budget provincial va de 33, 9 p. cent à l’Île-du-Prince-Edouard à 44,1 p. cent en Ontario. Est-il possible de croire que les courbes de qualité de soins et d’effort budgétaire soient parallèles?

En chiffres absolus, selon l’Institut canadien d’information sur la santé, en 2004, le Québec a consacré 3 656 $ par personne pour les soins de santé, le plus bas niveau observé de toutes les provinces canadiennes. Encore là, la minuscule Île-du-Prince-Edouard dépense 232 $ de plus par année par personne que le Québec. Au Manitoba, c’est 4 465 $ par personne et en Ontario 4 296 $.

Il faut que les directeurs de service des hôpitaux fassent des sorties publiques pour que le ministère et le ministre reçoivent leur message, comme cela s’est produit à l’Hôpital Charles-Lemoyne, sur la Rive-Sud de Montréal. L’institution doit, année après année, transférer 800 cas de cardiologie ers Montréal en raison de l’absence d’une salle d’hémodynamie. Question de gestion ça ou d’affectation budgétaire quand les médias prennent la relève de l’écoute du ministère?

L’Hôpital Pierre-Boucher, à Longueuil également, dispose de deux salles pour ce type de traitement. Une seule est utilisée. Question de gestion ou de budget?

Et se poursuit le prêchi-prêcha du faire plus avec moins. Y-a-t-il des limites à cela avant le dérapage total?

Parlant dérapage, jetons un coup d’œil sur le réseau routier. Là-dessus on ne lésine pas, selon les données de Transport Canada compilées par La Presse.

Une autoroute urbaine nous coûte 790 382 $ le kilomètre dans le sud du Québec. La moyenne canadienne est de 527 111 $. En milieu rural : 839 962 $ contre une moyenne canadienne de 532 396 $. Une route principale en milieu rural coûte au Québec de 683 376 $ le kilomètre à 793 361 $, face à une moyenne de 433 546 $ au Canada. Même phénomène pour les routes secondaires en milieu urbain : de 509 184 $ à 592 074 $ le kilomètre au Québec, 345 405 $ en moyenne au Canada. Ça, c’est pour la construction.

En entretien, le Québec ne donne pas sa place non plus, surtout en hiver. Le Québec dépense de 9 à 10 000 $ par année à ce chapitre, tandis que l’Ontario y consacre de 5 500 $ à 6 000 $.

Est-il, vraiment nécessaire de décrire la condition du réseau routier québécois?

Pour le réseau de la santé on dépense moins et on a moins.

Pour le réseau routier, on dépense plus et on a moins.

Est-ce à dire que, de plus en plus, ça va de moins en moins?

Clameurs, ombres et flammes,
Êtes-vous donc les âmes
De ceux que le tombeau
Comme un gardien fidèle
Pour la nuit éternelle
Retient dans son réseau?

Octave Crémazie (Les morts)

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